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La bagarre autour de la chasse au pinson.

 

Depuis une action commando contre la capture des ortolans, Allain Bougrain Dubourg ne compte pas que des amis dans les Landes. Hier à Tartas, le président de la Ligue de protection des oiseaux (LPO) n'a rien fait pour soigner localement sa popularité. Accompagné d'une petite dizaine de militants venus de Paris et d'Aquitaine, il a mené une opération coup de poing contre la chasse au pinson, un passereau protégé par la loi.

La tradition est très vivace dans le pays tarusate, « elle est ininterrompue depuis des siècles », souligne Jean-Jacques Lagüe, le président de l'Association départementale des chasses traditionnelles à la matole. Cette dernière est une cage grillagée où le pinson, un oiseau d'une vingtaine de grammes, est attiré par du grain et par le chant de l'appelant, un congénère capturé au préalable.

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Accord informel

Problème : cette chasse est illégale, au contraire de celle de l'alouette, qui est bel et bien ouverte jusqu'au 20 novembre. Mais, par l'un de ces détours dont l'administration a le secret, la prise des pinsons est « tolérée » par les autorités dans les Landes. Aucun arrêté préfectoral n'en fixe les modalités. L'accord est informel : les chasseurs peuvent utiliser 80 matoles chacun durant un mois, du 1er au 30 novembre. « C'est purement et simplement du braconnage sur lequel tout le monde ferme les yeux, à commencer par le préfet et les gendarmes. Regardez, on voit les installations depuis la route ! » s'insurge Allain Bougrain Dubourg en désignant des pièges non loin du bourg de Carcen-Ponson.

La LPO estime à 3 000 le nombre de piégeurs landais, ce qui entraînerait la pose de dizaines de milliers de matoles au cours du mois. Allain Bougrain Dubourg a eu l'occasion d'en discuter de vive voix avec Jean-Jacques Lagüe, accouru dès qu'il a eu vent de la « descente » de la LPO. De très vive voix, même.

On en vient presque aux mains

Après avoir confisqué des pièges et détruit des plants de tournesol (cultivés pour leurs graines) à Bégaar, Carcen-Ponson et Carcarès-Sainte-Croix, la petite troupe de la LPO est tombée sur des chasseurs très remontés à Audon.

Allain Bougrain Dubourg voulait entrer dans un champ pour « visiter » une nouvelle installation. Jean-Jacques Lagüe s'y est physiquement opposé. Les deux hommes se sont violemment bousculés mais n'ont pas échangé de coups. « Vous êtes un terroriste. Vous entrez chez les gens, vous volez et vous cassez. De quel droit ? Vous êtes de la gendarmerie ou de l'Office national de la chasse ? » a tonné Jean-Jacques Lagüe. « Je fais mon boulot de président de la LPO », a rétorqué son interlocuteur.

Pour ceux qui espéraient un dialogue, c'était raté. La brève empoignade a débouché sur le départ de la délégation de la LPO, qui craignait (à juste titre) que la situation ne s'envenimât. Les défenseurs des oiseaux sont repartis convaincus du bien-fondé de leur combat, après avoir rendu la liberté à d'autres passereaux attirés eux aussi par le grain des matoles : rouges-gorges, chardonnerets, verdiers, etc. Autant d'espèces protégées qui s'abîment dans les pièges.

« On ne peut pas dialoguer avec un mur. Tous les scientifiques s'accordent à dire que le pinson est en expansion. Une étude a été lancée pour en avoir le cœur net. L'État, les parlementaires des Landes, la Fédération de chasse et notre association travaillent à la mise en place d'une dérogation pour l'espèce », expliquaient après coup Jean-Jacques Lagüe et Alain Tauzia, le trésorier de l'association.

Ancien maire de Carcarès-Sainte-Croix, Jean-Marie Laterrade était quant à lui atterré. « J'ai pris une vingtaine d'oiseaux depuis le début de la chasse. Vous croyez que je mets la nature en danger ? Nous sommes sept ou huit chasseurs dans la commune, il y en avait 50 autrefois. La tradition s'estompe. Mes petits-enfants ne chasseront plus à la matole. Alors, où est le problème ?».

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